lundi 26 octobre 2009

La fiesta de Dudamel


On n’aura jamais autant entendu parler espagnol à la salle Pleyel, où Gustavo Dudamel dirigeait ces 23 et 24 octobre l’Orchestre Simón Bolivar des Jeunes du Venezuela et l’Orchestre Philharmonique de Radio France. Ce sont plus de 200 musiciens qui ont interprété vendredi la Symphonie fantastique de Berlioz. Et autant pour bisser au rythme du Mambo de Bernstein, se lever de leurs chaises, danser avec leurs instruments et entraîner le public à lancer avec eux ce fameux « Mambo ! »


Samedi, l’effectif était réduit à l’Orchestre Simón Bolivar seul, soit une bonne centaine de musiciens. S’il a eu autant de succès pour son Mambo que la veille, il a régalé le public de deux autres bis : la Danse n°4 du Ballet Estancia Malambo de l'Argentin Alberto Ginastera et la Marche de Radetzky de Johann Strauss père, connue pour clore le traditionnel concert du nouvel an de l’Orchestre Philharmonique de Vienne. Impossible de ne pas se sentir l’envie de battre des mains dans ce dernier bis, élan auquel le public de Pleyel, dirigé par la baguette même de Dudamel, n’a pas résisté, au gré des crescendo et decrescendo de l’orchestre. Une vraie fiesta où quelques notes de trompettes au moment où le public gagnait les sorties ont fait durer son plaisir et lui ont fait répondre quelques « Olé ! »

C’est certain, l’enthousiasme et la fougue de ce jeune chef d’orchestre galvanise autant le public que les orchestres. À 28 ans, il dirige depuis dix ans déjà l’Orchestre Simon Bolivar et vient de prendre la direction de l’Orchestre Philharmonique de Los Angeles. Si, en 2007, il obtenait le Premio de la Latindad, il a reçu samedi l’insigne de Chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres des mains de Frédéric Mitterrand.
Autre récompensé, José Antonio Abreu a reçu l’insigne d’Officier de la Légion d’honneur en reconnaissance de son travail. En 1975, celui-ci fonde le Système national d’orchestres de jeunes et d’enfants au Venezuela, fondation d’État plus couramment appelée « le Sistema ». Ce réseau d'orchestre permet à quelque 265000 enfants de 2 à 20 ans de recevoir une éducation musicale poussée dans les bidonvilles du pays. Pour eux, la musique est un moyen d’ascension sociale, un espoir, d'où le slogan du Sistema "tocar y luchar" (jouer et lutter). Selon son fondateur, le Sistema est un programme d'insertion sociale très rapide et efficace parce qu'il gagne l'entourage de chaque enfant inscrit : parents, amis, voisins. C'est aussi un lieu d'apprentissage du travail en équipe, de la discipline, de la rigueur et de la concentration ; un lieu où les parents envoient volontiers leurs enfants, rassurés de les savoir au centre plutôt que dans la rue, à affronter la violence aveugle des gangs et d'autres dangers comme la drogue. Ce programme est aussi un moyen de leur faire parvenir les apports d’une musique considérée comme fermée au peuple pour qu’ils se l’approprient et l’enrichissent de leur propre culture.
Le résultat est là : le Sistema a été imité dans 25 pays et l'Organisation des États américains s'en est inspiré pour créer l'Orchestre des jeunes des Amériques. Quant à l'Orchestre Simon Bolivar, il est désormais reconnu internationalement et sa couleur particulière nous fait prendre conscience de ce que la culture latino-américaine peut apporter à notre musique occidentale.


Pour plus d’information sur le Sistema, un reportage sur Arte lundi 26 octobre à 22h15 à revoir pendant une semaine sur
Pour écouter le concert du 23 octobre, suivre ce lien :

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